Qu’est-ce que cela signifie, être responsable ?
En général, la responsabilité, c’est avoir des comptes à rendre. On répond de ses actes à quelqu’un, soit qu’il se trouve dans une position d’autorité, soit à ses pairs. La folie rend juridiquement irresponsable, mais la cloison est mince entre normalité et folie. Althusser tue sa femme et est déclaré irresponsable. Il souffrait de psychose maniaco-dépressive. Mais lui-même considérait qu’en le déclarant irresponsable on lui ôtait sa condition humaine. Nous vivons en société : la responsabilité peut être individuelle ou collective. Mais qu’est-ce que peut être la responsabilité collective ? Est-ce que chacun a une responsabilité égale à la responsabilité totale divisée par le nombre de membres de la communauté ? Pour Socrate, le bien est l’objet de la raison. On ne peut pas faire du mal volontairement. Le mal est le produit de l’ignorance. Et d’une certaine façon l’ignorance rend aussi irresponsable. Nous n’avons plus la même vision aujourd’hui. Des gens très rationnels comme Eichmann ont fait le mal à un niveau spectaculaire.
Il y a la responsabilité morale et la responsabilité juridique. Lorsqu’il y a des « lois scélérates », cela ouvre le principe de la désobéissance civile : je réponds d’abord devant ma conscience. Nous avons tous une perception morale. La question des fondements de la morale est très difficile. Les règles juridiques sont l’expression d’un rapport de forces. La morale transcende. Est-ce que c’est l’intention de faire le mal qui est déterminante ? Ou bien sont-ce les conséquences de nos actes ? Mais nous ne pouvons pas toujours calculer la totalité des conséquences de nos actes. Nous pouvons être responsables par une incapacité grave à anticiper les conséquences de nos actes. Si nous ne sommes pas capables de prévoir, il faut appliquer le principe de précaution. Dans certaines circonstances, il y a un devoir de savoir : nous sommes d’une certaine façon responsables de notre ignorance. Nous ne pouvons pas dire « je préfère ne pas savoir ». L’imputabilité, c’est la face objective de la responsabilité. C’est établir que quelqu’un est « la cause » d’un effet, d’un dommage, par exemple, qui dans ce sens est imputable à son auteur. Mais l’imputabilité n’implique pas automatiquement responsabilité, il peut- y avoir inconscience, ignorance ou folie. Pour Kant, la liberté est nécessaire pour que nous soyons responsables. Nous ne sommes pas responsable de ce que nous n’avons pas choisi de faire ou de ce que nous ne pouvons pas éviter de faire. C’est pourquoi la liberté est liée à l’autonomie.